OS : Bonne question, je n'en sais rien. Je suis ouverte à toute proposition de titre.

Bien le bonjour, bien le bonsoir.
Comme d'habitude, je vous livre ici un texte joyeux et drôle. Preuve en est qu'actuellement, je vous écris en direct du sol, pour cause de fou-rire aigu à la relecture. J'en pleure, même !
Vous ne me croyez pas ? Je comprends, j'ai du mal à me croire aussi.
J'ai essayé d'innover un peu. C'était dur. J'ai commencé ce texte sans jamais avoir la force de le finir. Et puis, mes cauchemars aidant, j'ai réussi à me replonger dedans.
J'aimerai vous dire "Enjoy", mais je me contenterai d'un bonne lecture. J'autorise les lancers de tomates.





_____Il était une fois, un bel homme. La Nature l'avait gâté, non seulement au niveau de l'apparence physique, mais sur bien d'autres points : sa gentillesse lui apporta quatre fidèles amis dont il ne se séparait jamais et son intelligence lui octroya un poste prestigieux à la tête d'une entreprise. Mieux encore, le tout envoya à sa rencontre un homme d'une beauté égale à la sienne, dont il tomba éperdument amoureux. Mais force est de reconnaître que la Nature se devait d'être injuste envers lui aussi : il avait une confiance aveugle en le monde et était d'une naïveté à en faire pâlir les plus innocents.
_____Le Bonheur qui était le leur était incommensurable. Les deux amants ne pouvaient supporter la séparation, si bien que quelques heures passées loin de l'autre les plongeaient dans un état second. Les retrouvailles étaient toujours merveilleuses : tantôt se suffisant d'un regard assurant la présence de l'autre, tantôt se déroulant de manière charnelle. Ils s'aimaient plus que quiconque et défiaient Dieu de les contredire. Là était malheureusement le problème.
_____Bien sûr, ils ne la virent pas tout de suite, la petite déchirure qui s'agrandissait de jour en jour sur la toile de leur amour, malgré les mises en garde de leurs proches. On les avait prévenus, on avait cherché à leur faire comprendre. Rien n'y faisait ; il leur fallut du temps, des larmes et de la souffrance pour se rendre compte de l'irréparable.
_____Ainsi, notre homme ne remarqua pas qu'il s'éloignait de ses amis, jusqu'à ne plus répondre à leurs appels inquiets. Il pensait, comme son amant, qu'ils n'avaient pas de raison de s'enquérir, et il ne voyait l'utilité d'écouter leurs conseils. De même qu'il ne se soucia pas du chiffre d'affaire de son entreprise qui chutait considérablement ; tout ce qu'il lui importait était le surplus de temps qu'il avait gagné avec son amour. Il ne vit pas non plus arriver la première dispute, mais nota tout de même le coquard violacé qui en résultait, placé bien en évidence sur son œil. Il savait qu'il avait été trop loin ; après tout, il n'avait pas à regarder un autre homme, même s'il n'avait pas le souvenir de l'avoir fait. Peu importait, son amant avait sûrement raison.
_____La deuxième dispute arriva peu de temps après. Il ne remarqua sa lèvre fendue qu'une fois devant son miroir. Les mots que lui avaient dit son amant avaient été bien plus blessants, lui faisant oublier tout le reste. Cependant, ce dernier avait raison : pourquoi notre homme était-il rentré en retard ? Pourquoi ne pas l'avoir prévenu ? La culpabilité rongeait son être, il avait inquiété la personne qui comptait le plus pour lui.
_____Et les mois passèrent, puis les années. On avait arrêté de compter les disputes tant elles étaient récurrentes et basées sur les mêmes thèmes idiots. La dernière avait valu à notre homme un bras cassé. Il l'avait bien mérité se disait-il, tout était encore de sa faute, avait rajouté son amant. Il était sorti. Il avait osé sortir alors qu'il n'avait plus le droit de quitter l'appartement. À ce moment-là, il n'avait plus ni amis, ni travail. Coupé du reste du monde, il subissait la colère de l'homme avec qui il partageait sa vie. Tout quitter pour mieux recommencer, il ne pouvait pas, il l'aimait. Ou du moins, faisait de son mieux pour s'en convaincre, pour se rappeler de ce sentiment merveilleux qui le quittait parfois, un peu trop souvent.
_____Ses amis l'avaient abandonné, prétextant qu'il ne donnait plus de nouvelles et fermant les yeux sur la soumission qui peignait ses traits. Ce n'était pas faute de l'avoir prévenu, après tout. Son entreprise avait fait faillite, et si ses employés avaient su rebondir vers d'autres horizons, lui s'était retrouvé ruiné et criblé de dettes. La Nature même semblait l'avoir abandonné : sa beauté sans pareille n'était plus, laissant place à un visage décharné, caractérisé par des yeux vides de toute émotion mais pleins de larmes, des lèvres massacrées autant par les coups que les baisers possessifs de son amant et des joues blanches, affreusement blanches, comme si aucune teinte de couleur ne les avait jamais traversées. Son intelligence l'avait délaissée elle aussi, lui qui suivait son amant sans se poser de questions. Lui n'était plus rien, son amant, c'était tout. Son tout.
_____Un jour, il avait compris. Il s'était observé longtemps dans le miroir et avait fini par voir à quelle point sa vie était détruite. À quel point les valeurs si chères à son cœur telles que la liberté, ne faisaient plus partie des lambeaux de sa vie. Il avait mis ses sentiments de côté, pour écouter sa Raison. Cette petite voix qui lui conseillait depuis bien trop longtemps de s'échapper, de partir loin sans un regard en arrière. Il s'était emparé d'une paire de ciseaux. Et il avait commencé son œuvre, son renouveau.
_____Lorsque son amant rentra ce soir-là, force était de constater qu'une mauvaise surprise l'attendait. L'homme l'attendait de pied ferme, valise à la main. Ses cheveux étaient coupés courts, comme au temps où il était encore lui-même. Il avait choisi ses vêtements avec soin. Il s'agissait de ceux qu'il portait pour leur première rencontre. Avec assurance, il déclara qu'il ne pouvait plus vivre de cette façon, qu'il se sentait un peu mourir chaque jour. Qu'il allait faire comme s'ils ne s'étaient jamais connus.
_____L'histoire pourrait en rester là. Il aurait pu contourner son amant, et disparaître à tout jamais. Rencontrer quelqu'un et avoir enfin la belle et heureuse vie à laquelle il aspirait. Retrouver un emploi, se faire des amis, des vrais cette fois-ci. Mais ce serait fabuler que de raconter pareille histoire.
_____En réalité, après son discours, son amant le darda d'un regard froid, dénué de toute émotion. Avec calme, celui-ci s'empara des ciseaux que l'homme avait négligemment laissé sur la table. Ce qu'il devait arriver, arriva. Lui qui avait annoncé se sentir mourir à petit feu, eut droit à la délivrance. Son corps sans vie s'écroula abruptement dans les bras de l'homme qu'il avait tant aimé, tandis que les ciseaux tombaient au sol dans un cliquetis macabre, éclaboussant le parquet de tâches pourpres.
_____Quelques jours plus tard eut lieu son enterrement. Personne ne vint. Pas même son amant. Peut-être parce qu'il était mort également et que sa mise en terre se faisait au même moment, au même endroit. On fit inscrire sur la tombe « Aux Amants Maudits ». On ne se doutait pas que les rassembler dans la vie éternelle, c'était prolonger un peu plus le cauchemar qu'était celui de notre homme.
_____Il était une fois, un bel homme. La Nature l'avait gâté. Il ignorait que tout se payait, dans la vie. Et que tout ce que la Nature donne, la Nature le reprend tôt ou tard.




Note de l'auteur : Je sollicite votre aide pour le titre ! J'hésitais à encore mettre une chanson... Au final, je n'en aurais plus en stock.