OS : I Hate Everything About You, Why Do I Love You ?

_____Tous l'avait compris, et ce, sans se passer le mot, que Nishikido Ryo était énervé. Et tous savaient que dans ce cas-là, mieux valait le laisser tranquille. « Tous », c'était le reste des NEWS. Ils marchaient derrière Ryo, tout en lui lançant quelques œillades craintives, direction leur loge. Lorsqu'ils y parvinrent, ils furent quasiment tous soulagés de ne pas avoir mis leurs affaires à côté de celles de Ryo. Oui, « quasiment » parce que le pauvre Kato Shigeaki fixait tour à tour le dos de l'Énervé et son sac qui, par miracle, n'avait pas encore atterri par terre. N'avait pas encore été balancé par terre aurait été plus juste. Vous l'aurez compris, Shigeaki n'aimait pas Ryo, et c'était réciproque.
_____Néanmoins, Shigeaki ne se laissa pas intimider, ou du moins, fit de son mieux pour ne pas le laisser paraître, par les grognements incompréhensibles de son voisin et ses mouvements brusques pour se changer. Il s'approcha lentement de son sac, manqua au passage de perdre un œil lorsque Ryo enleva son tee-shirt et que son coude fit un violent écart, mais ne le fit pas remarquer ; il ne voulait pas s'attirer les foudres de Ryo plus qu'elles n'étaient déjà sur lui. Un mot, et l'orage arrivait. Il se fit donc violence. Il fouilla son sac à la recherche de son portable qu'il ne trouva pas. Étonné, il fouilla une seconde fois. À la troisième exploration de son sac, il fut forcé d'admettre qu'il n'avait pas son portable et se mit à paniquer. Il jeta un regard circulaire à la pièce, ses yeux s'attardant un peu partout. Il ne remarqua pas que le duo TegoMass était en train de partir, ni que leur leader, Tomohisa, réunissait ses dernières affaires dans l'espoir de terminer enfin cette longue journée qui s'était achevée, il fallait l'avouer, sur un échec : Ryo et sa mauvaise humeur, due à on ne sait quel détail qui ne lui avait pas plu pendant le tournage de cet énième Shounen Club. Restèrent alors dans la loge que Ryo, Shigeaki et son meilleur ami, Keiichiro. Lequel se fit très vite accosté par Shigeaki, le faisant sursauter.

_ Kei, t'aurais pas vu mon portable ? Demanda-t-il.

_____Keiichiro allait directement répondre non quand ses yeux s'écarquillèrent et que sa bouche s'ouvrit un peu.

_ Ne me dis pas que tu l'as encore caché quelque part et que tu viens de t'en rappeler ! Se plaignit Shigeaki, avec une pointe de soulagement à l'idée de retrouver l'objet dont il était question.

_____L'aîné hocha la tête et en réponse à la question muette de Shigeaki, il montra du doigt le sac de Ryo que ce dernier était en train de malmener pour y récupérer on ne sait quoi.

_ C'est pas vrai Kei ! T'as pas fait ça ! Chuchota précipitamment Shigeaki.

_____Keiichiro joignit ses deux mains en signe d'excuse et lui dit, sur le même ton :

_ Bah, au pire, tu le récupères demain...
_ Ça va pas ! Et puis quoi encore ? J'vais me gêner pour aller le récupérer tiens ! C'est pas parce que Môôôssieur Nishikido est en colère qu'on ne peut rien lui demander. Après, peut-être que ma politesse le froissera. De toute façon, tout ce qu'on lui dit l'énerve. Ah non, tout ce que je lui dis l'énerve.

_____Keiichiro lança un regard par dessus l'épaule de Shigeaki et pâlit d'un coup. Ryo les regardait. Enfin, il regardait le dos de Shigeaki. Et il n'avait pas l'air content. Du tout. Keiichiro tenta de faire dans la discrétion et indiqua d'un coup de tête à Shigeaki de se retourner. Ce qu'il ne vit pas, son meilleur ami étant à présent dos à lui, c'est que celui-ci avait pâlit et que sa petite montée d'assurance avait brusquement disparue en croisant le regard de Ryo. Keiichiro murmura quelque chose que Shigeaki ne comprit pas, trop occupé à se traiter mentalement d'idiot pour avoir parlé trop fort. Ryo allait le massacrer.

_ Mais dis-moi Kato... Si tu as quelque chose à me dire, je t'attends, viens !

_____Shigeaki déglutit bruyamment et détourna son regard, gêné. Ryo s'approcha de son vis-à-vis pour le faire parler mais Keiichiro s'interposa.

_ Ryo, je ne pense pas que ce soit le moment pour parler. On est tous fatigué, on est énervé... tenta Keiichiro.
_ Ce n'est pas toi qui disait qu'on devait arrêter de se comporter comme des gamins et se parler franchement ? Je propose qu'on le fasse maintenant.

_____Keiichiro ne répondit pas, hésitant. Il fixa un instant Ryo puis hocha brièvement la tête, sous le regard interloqué de son meilleur ami. Shigeaki lança un regard paniqué à Ryo et un regard suppliant à Keiichiro qui lui posa seulement une main sur l'épaule en signe d'encouragement. Shigeaki et Ryo se retrouvèrent donc seuls.

_ Alors maintenant que ton meilleur ami est plus là pour te protéger, tu fais moins le fier hein ?
_ Je croyais qu'on devait discuter... Pas que tu devais passer ta colère sur moi, répliqua Shigeaki.
_ Mais ma colère, c'est toi qui l'a provoquée.
_ Je n'ai rien fait ! S'écria de suite le cadet.
_ Ne mens pas, tu m'as humilié pendant l'émission.

_____Shigeaki fut secoué par la réponse. Il n'avait jamais humilié personne, pas même son pire ennemi. Alors qu'avait-il pu bien faire ? Il avait beau se creuser la tête, rien ne lui venait à l'esprit. Ou peut-être était-ce le regard glacial que lui lançait Ryo qui l'empêchait de réfléchir correctement.

_ Je ne comprends pas, finit-il par admettre.
_ Tu ne comprends pas, hein...

_____Ryo prit une longue inspiration, comme pour empêcher sa colère d'exploser. Il ferma les yeux. Shigeaki observa Ryo tenter de garder son calme. Il le trouvait déjà terrifiant en temps normal, alors il n'osait imaginer ce que serait son aîné sans un minimum de self-control. Il n'eut pas à attendre longtemps avant d'en avoir une démonstration.
_____Le poing de Ryo fendit brusquement l'air, laissant à peine à Shigeaki le temps de se reculer vivement, pour finir sa course contre le mur de la loge, dans un bruit sourd. Une fois la surprise passée, les jambes du plus jeune se mirent à trembler violemment, semblant à peine se rendre compte de ce qui venait de se passer. Il sentait son cœur battre à toute allure contre sa cage thoracique. Le regard de Ryo ancré sur lui était noir de haine, tant et si bien que Shigeaki ne parvenait pas à le fixer.

_ Tu te moques de moi ? Souffla Ryo.

_____Afin d'obtenir toute l'attention du cadet, il se rapprocha de lui, plus encore que la proximité que son coup avait créé.

_ Devant des milliers de personnes, tu m'as traité de tyran. C'est facile de se faire passer pour la victime. Mais toi et les autres oubliez que dans ce genre de relation, la victime a souvent fait quelque chose pour que l'autre devienne le bourreau.
_ J'ai juste dit que j'avais du mal avec toi ! Que nos rapports n'étaient pas franchement amicaux ! Vois par toi-même la position dans laquelle nous sommes ! Le summum de l'amitié et de l'entente ! Shigeaki fut secoué d'une sorte de fou-rire nerveux.
_ Tu as une mémoire bien sélective. Tu as rajouté que je t'avais fait pleuré deux fois, que tu avais peur de moi, que tu fuyais dès que tu devais te retrouver seul avec moi... Et quand à notre situation actuelle, ne me dis pas que tu ne l'as pas cherché. Je ne te louperai pas cette fois-ci, fit Ryo en désignant son poing.
_ Tegoshi aussi a dit qu'il avait peur de toi ! Pourquoi te venger sur moi alors ? Pourquoi toujours et seulement moi ?!
_ Parce que tu fais de même ! Dès que quelque chose ne va pas, c'est sur moi que tu t'acharnes !
_ Arrête ! Hurla Shigeaki avant de saisir le poing de Ryo et de le plaquer contre le torse de ce dernier. Tu ne te rends même pas compte de ce que tu fais ! Tu déformes la réalité ! C'est toujours toi qui t'aperçois que je ne vais pas bien, toujours toi qui glisse la remarque qui saura me faire sortir de mes gonds ! Encore et toujours toi qui arrive à me mettre à bout ! Maintenant, ça suffit. J'en peux plus. Je ne veux plus être ton défouloir. Trouve-toi quelqu'un d'autre, j'abandonne. La seule chose que tu auras de moi à partir de maintenant, c'est une profonde indifférence.

_____Shigeaki ne parvenait pas lui-même à croire ce qu'il venait de dire. Il avait réussi à trouver en lui le courage nécessaire pour cracher tout ce qu'il avait sur le cœur. Cela faisait des années que Ryo le provoquait, le blessait, des années que lui répondait, qu'il souffrait. Qu'avait-il cherché à faire en racontant une part de son calvaire à la télévision ? Tourner le tout en dérision et espérer une paix ? Dans tous les cas, jamais il n'aurait pensé que cela mettrait Ryo dans un tel état, ni que cela finirait par empirer leur relation. Il n'avait pas encore idée que celle-ci pouvait encore se dégrader.
_____Songeant soudain à l'imprévisibilité des réactions de Ryo, et craignant surtout une brusque colère, Shigeaki se glissa sur le côté et rejoignit son sac, dans l'espoir de quitter cette loge maudite au plus vite. La peur était revenue en lui et il se voyait déjà courir à travers les couloirs du bâtiment pour lui échapper. Il n'eut pas le temps de ranger les affaires qu'il avait éparpillées un peu partout lorsqu'il était à la recherche de son portable, que déjà une main le tirait vers l'arrière et il se retrouva à nouveau plaqué au mur, à la différence près que l'avant bras de Ryo était maintenant positionné sur sa gorge. Sa respiration se fit immédiatement sifflante, tant Ryo maintenait la pression pour ne pas qu'il s'échappe. Quelque chose avait changé dans le regard de ce dernier : il y avait toujours cette haine pure et dure que l'on pouvait voir dans ses yeux, mais elle semblait presque hésitante, incertaine. Comme si Ryo avait pris conscience des paroles de Shigeaki et qu'elles l'avaient mis dans le doute.
_____Il colla sa joue contre celle de son cadet, de manière à pouvoir lui parler dans l'oreille. L'action renforça son appui sur la gorge de Shigeaki qui plissa automatiquement les yeux, comme si cela pouvait l'aider à supporter la douleur. Sa poitrine se soulevait difficilement, l'air peinant à entrer dans son corps. Ses mains étaient cramponnées au bras de Ryo, dans l'espoir vain de le faire lâcher prise, mais le manque d'air semblait l'avoir considérablement affaibli.

_ Tu m'énerves. Je ne comprends pas pourquoi tu m'énerves autant.

_____Shigeaki balança un coup de coude dans les côtes de Ryo, mais celui-ci encaissa, sans mot dire. La vision de Shigeaki commençait à se teinter de noir, et il sentait qu'il n'allait pas tarder à perdre connaissance.

_ Explique-moi pourquoi je ne peux pas tout simplement t'ignorer. Pourquoi je ne peux pas me contenter de tes sourires, de tes bêtises, pourquoi je dois vouloir toujours plus, comme ta haine, ou ta douleur, pour me sentir bien ? Pourquoi je me sens unique quand tu me hurles dessus ? Dis-moi pourquoi je passe mon temps à te regarder pour toujours trouver quelque chose à redire sur ton comportement. Hein ?! Dis-moi ! Dis-moi que toi aussi, tu ressens tout ça ! Dis-le moi !

_____Ryo avait brusquement hurlé les trois derniers mots. Pour entendre la réponse de Shigeaki, il dut retirer son bras, mais resta tout de même collé à celui-ci, afin de ne lui laisser aucune échappatoire. Le cadet chancela dangereusement, tout en avalant de grandes goulées d'air. Il resta un moment pantelant sans trop savoir si cela était dû au fait de retrouver une respiration normale ou si c'était à cause de la déclaration de Ryo.
_____Shigeaki eut un déclic. Ryo venait de se déclarer. Ce n'était pas vraiment une déclaration d'amour au sens propre, grouillant de « je t'aime » et de niaiserie. Ça n'avait pas la forme, mais le fond. Un fond emprunt de possessivité et de haine. Le plus jeune ouvrit la bouche sous le poids de la décontenance et de la surprise. Comment cela avait-il pu arriver ? Ryo avait toujours détesté son cadet ! Mais peut-être y avait-il, sur l'image de Shigeaki figurant dans l'esprit de Ryo, une bonne couche de haine qui, au final, ne reposait sur rien ? Qui s'était craquelée au fil du temps pour laisser un tout autre sentiment s'immiscer ? Ce sentiment qui était resté invisible durant toutes ces années, mais qui pourtant était bien présent...

_ Tu fais la même tête que Yamapi quand je lui ai dit tout ce que j'avais sur le cœur.

_____La cassure du silence fit sortir Shigeaki de ses rêveries. « Yamapi » était le surnom affectif que les NEWS avaient donné à leur leader. Ce dernier était au courant de tout et pourtant, il n'était pas resté pour veiller à ce que Shigeaki et Ryo ne se retrouvent pas seuls. Bien sûr, il ne pouvait pas prévoir que ces deux-là finiraient par s'entretuer, mais Shigeaki ne parvenait pas à lui pardonner. Il y avait quand même dans les paroles de Ryo une énorme part de sadisme qui en aurait alerté plus d'un.
_____Les yeux de Shigeaki heurtèrent ceux désemparés de Ryo. Jamais, Ô grand jamais, le plus jeune n'avait vu cette lueur de détresse au fond de ces prunelles d'encre. La chose était d'autant plus improbable qu'il en était la cause.

_ Toi aussi, tu penses que je suis amoureux de toi ?

_____La voix de Ryo était plus faible qu'un murmure, et pourtant elle fut conséquence d'un vacarme monstrueux dans la tête de Shigeaki : ainsi ses doutes étaient fondés. Peut-être aurait-il mieux valu que Ryo le frappe, il n'aurait pas eu à affronter la réalité en face. Au moins, il n'aurait pas eu l'horrible impression de se retrouver projeté dans la gueule du loup ; Ryo l'aimait autant qu'il le détestait. De quel côté allait-il faire pencher la balance ?

_ Toi aussi, tu vas me parler de ces conneries de frontière entre la haine et l'amour ? Comme Yamapi, tu vas user de belles paroles et me dire qu'aussi infime soit cette frontière, je marche dessus et qu'il ne tient qu'à moi de basculer du bon côté... De faire le bon choix...

_____« Maudit Yamapi » songea Shigeaki. Pourquoi lui avait-il dit ça ? Pourquoi n'avait-il pas simplement hoché la tête et compati ? Il aurait dû laisser Ryo croire qu'il détestait son cadet. Rien n'aurait changé, la routine serait restée confortablement installée dans leurs vies, entre deux regards tueurs et insultes diverses.

_ Vous ne comprenez pas...

_____Le poing de l'aîné s'abattit mollement contre le mur mais Shigeaki en fut terrorisé. Il craignait une autre subite montée de colère. Il esquissa un mouvement pour se dégager mais Ryo le maintenait fermement contre lui.

_ Si tu me hais, je te hais aussi ; et vice-versa. Tout dépend de toi... Mais tu ne sembles pas décidé à faire le premier pas.

_____Alors, aussi soudainement que toutes les actions faites jusqu'à présent, Ryo posa ses lèvres sur Shigeaki. Ce dernier se figea immédiatement, le souffle coupé. Ce n'est que lorsqu'il sentit la main de Ryo effleurer son torse avec une douceur qui le désarçonna qu'il reprit ses esprits. Il attrapa la main baladeuse et tourna la tête. L'aîné, contrarié, repartit à l'assaut de ses lèvres, mais Shigeaki le repoussa. Frustré de voir que son cadet ne réagissait pas comme il l'avait souhaité, Ryo saisit ses poignets pour l'empêcher de le repousser (même si Shigeaki n'avait pas la force nécessaire) et plongea dans son cou. La réaction du plus jeune ne se fit pas attendre : Shigeaki lui hurla d'arrêter et se débattit comme un beau diable. Ryo, complètement désemparé de voir son raisonnement s'écrouler, mais surtout en colère, gifla son vis-à-vis de toutes ses forces. Le choc fit vaciller Shigeaki qui serait tombé si l'aîné ne le retenait pas. La douleur cuisante sur sa joue lui fit immédiatement monter les larmes aux yeux et il lança un regard effrayé à Ryo. Et il sut que ce fut une grosse erreur. Montrer sa faiblesse à Ryo, alors que celui-ci lui avait fait clairement comprendre que c'était ce qu'il recherchait depuis des années, était stupide. Il le comprit au moment où les lèvres de Ryo s'étirèrent en un sourire et que son regard brilla de cette lueur appelée folie. Ryo s'attela à déshabiller Shigeaki, avec brutalité et impatience. Alors Shigeaki rendit les armes : il mit de côté toute la fierté qui lui restait et le supplia d'arrêter. Cela ne fit que renforcer la précipitation de Ryo qui fit sauter les boutons de la chemise du cadet. Ce dernier fut secoué d'un sanglot tandis qu'il continuait de se débattre avec prudence, redoutant que Ryo use à nouveau de la violence.
_____Soudain, la porte de la loge s'ouvrit avec grand fracas. Shigeaki put apercevoir, à travers ses larmes, les membres de son groupe observer la scène avec effroi. Ryo ne bougeait pas non plus ; il semblait attendre la suite. Et comme si ce temps de pause ne s'était jamais produit, Tomohisa se précipita sur Ryo et le ceintura. Il tenta de l'attirer plus loin, là ou Shigeaki ne serait plus à sa portée, mais Ryo se cramponnait fermement à la chemise déchirée. Takahisa et Yuya imitèrent leur leader, tandis que Keiichiro rejoignit son meilleur ami et tenta de faire lâcher prise à Ryo. Finalement, les doigts cédèrent et les quatre membres, emportés par leur élan, furent propulsés à l'autre bout de la loge. Immédiatement, Tomohisa tenta de faire asseoir Ryo, pour le dissuader de se jeter sur sa cible. La tâche ne fut pas aisée et le leader finit par tout simplement le mettre à terre, sous le regard du duo TegoMass qui ne savait quoi faire. Au même moment, Shigeaki s'effondra au sol, ses sanglots secouant son corps de spasmes et ses lèvres emportées dans une litanie infernale de suppliques. Keiichiro lança un regard paniqué au reste du groupe. Ryo, face contre terre, hurla de rage et essaya de se dégager de la poigne de fer de Tomohisa qui le maintenait au sol. Shigeaki hoqueta, sous l'effet de la panique et Keiichiro, décomposé, le prit dans ses bras. Que pouvait-il faire de plus ? Il était arrivé trop tard. Ou plutôt, il avait refusé d'arriver plus tôt. Mais il n'eut pas le temps de songer à sa culpabilité : la voix de Tomohisa résonna dans la loge, dure, tranchante.

_ Est-ce que tu te rends compte de ce qu'il se serait passé si nous n'étions pas intervenus ?! Tu aurais bousillé sa vie, et la tienne par la même occasion ! Ça ne t'importe pas ? C'est comme ça que tu l'aimes ?!

_____Les paroles eurent l'effet d'une douche froide sur Ryo, qui cessa tout mouvement. Ses yeux n'avaient pas quitté Shigeaki et pourtant, il lui semblait voir son cadet sous un tout autre œil. Comment avait-il pu vouloir sa souffrance ? Comment avait-il osé laisser cette infâme marque rouge sur cette joue d'ordinaire si parfaite ? Les paroles de Tomohisa lui revinrent en tête. Avait-il franchi la frontière, maintenant que le mal était fait ? Une larme coula silencieusement le long de son visage.

_ Shige, je... tenta péniblement Ryo, brisant ainsi le silence assourdissant qui régnait. Je suis désolé... Je te promets, je ne te ferai plus de mal... plus jamais...
_ Comment oses-tu...

_____La voix de Keiichiro était tremblante. Elle vibrait d'une colère sourde.

_ Tu ne peux pas dire ce genre de choses. Pas après ce qui vient de se passer.
_ Pas après ce que tu as failli lui faire, ajouta Tegoshi, d'une petite voix.
_ Shige... S'il te plaît, approche-toi... viens vers moi, je...

_____La main de Keiichiro claqua violemment le sol pour lui intimer le silence. Le corps de Shigeaki se tendait de plus en plus, au fur et à mesure que Ryo parlait. Takahisa sembla le remarquer car il déclara, comme pour conclure la conversation :

_ Faisant partie du même groupe, il n'est pas possible de séparer Shige et Ryo et je pense que nous sommes tous d'accord sur le fait que nous ne voulons pas que les NEWS disparaissent. Mais je m'assurerai que jamais plus, vous ne serez seuls tous les deux. Je surveillerai à chaque moment que tu ne t'approches pas trop près de Shige. Et si jamais tu le touches à nouveau, je ferais de ta vie un enfer.

_____Personne n'avait jamais entendu Takahisa parler de cette manière ; pour preuve, lui-même ne se souvenait pas avoir un jour parlé avec tant de hargne et de dégoût. Pourtant, personne ne s'en étonna, car tous intimement convaincus qu'ils auraient tenu le même type de discours. Tomohisa, décidant de faire cesser ce cauchemar, releva brutalement Ryo, qui semblait vidé de toute énergie, et le traîna jusqu'à la sortie. Ce ne fut qu'à ce moment là que le Tortionnaire se réveilla.

_ Lâche-moi ! Shige, pardonne-moi ! Ne me laisse pas, s'il te plaît ! Brise-moi comme je t'ai brisé, mais aime-moi !

_____Une petite plainte s'éleva de la gorge de Shigeaki. Le leader émit un soupir agacé et renforça sa prise sur Ryo. Le duo TegoMass partit aider Tomohisa, préférant laisser les deux meilleurs amis seuls. Ryo continua de hurler, ce qui fit redoubler les pleurs de la Victime. Keiichiro se contenta de renforcer son étreinte.

_ Je suis désolé Shige... Nous sommes tous à blâmer. Quand j'ai quitté la loge, j'ai réussi à rattraper Yamapi et je lui ai expliqué que vous alliez enfin discuter sérieusement. Paniqué, il m'a expliqué tout ce que Ryo lui avait dit, alors que nous faisions demi-tour. Il avait peur qu'il ne fasse une bêtise.... J'ai appelé Tego et Masu, histoire que si les choses dégénéraient... Ils ont aussitôt rappliqué et on vous a écouté. Maintes fois, Yamapi voulait intervenir et cesser tout ça ; maintes fois je l'ai retenu. Je ne connais pas Ryo aussi bien que lui, je ne savais pas de quoi il était capable. Et tout s'est passé très vite... Yamapi a entendu la gifle et tes demandes, alors il s'est précipité, on a simplement suivi. Je suis le plus fautif dans l'histoire...

_____Keiichiro sentit ses yeux le brûler ; il ne chercha pas à contenir ses larmes. Elles dévalèrent ses joues pour terminer leur course sur l'épaule de Shigeaki, qu'il tenait toujours étroitement enlacé contre lui. Cependant, aussi proche qu'il le fut, Keiichiro n'entendit pas le minuscule « Ryo... » que Shigeaki prononça entre deux soupirs.